Bitcoin et autres cryptomonnaies
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Aujourd’hui utilisées à leurs risques et périls par des professionnels de la finance ou par une poignée d’adeptes, les monnaies virtuelles deviendront-elles un jour accessibles au grand public? se demande Le Devoir.

Dans son édition du week-end, le quotidien estime cela « possible », à condition toutefois que certaines conditions soient remplies, à commencer par un sérieux encadrement de la part des autorités de régulation financière.

Évoquant le récent cas de la firme canadienne QuadrigaCX, dont la mort du fondateur risque de priver quelque 115 000 personnes de leur investissement, Le Devoir affirme que les personnes qui croient en l’avenir de ce type de produits « craignent aujourd’hui que les déboires de la plateforme d’échange, qu’ils attribuent à de mauvaises pratiques, aient pour effet d’entacher la réputation de tout le secteur ».

UNE VALEUR REFUGE AU MÊME TITRE QUE L’OR?

Pourtant, soutient Jonathan Hamel, une monnaie comme le bitcoin a prouvé qu’elle pouvait être utile dans plusieurs domaines. Interrogé par le journal, le fondateur de l’Académie Bitcoin, une compagnie dont l’objectif est de fournir du soutien aux entreprises désireuses de mieux connaître la cryptomonnaie, il croit que cette dernière pourrait constituer une valeur refuge, au même titre que l’or, par exemple. « Il y a probablement un marché énorme pour des investisseurs qui voudraient préserver de la valeur », assure-t-il.

Économiste principal chez Desjardins, Hendrix Vachon écrivait néanmoins, dans une note de synthèse publiée en juillet dernier, que « la multiplication des cryptomonnaies met à mal la comparaison avec l’or, pour lequel il n’existe pas de véritable substitut ». En outre, ajoutait-il, « il n’y a pas de demande pour utiliser les cryptomonnaies dans des processus de fabrication, comme c’est plutôt le cas pour n’importe quelle ressource, incluant l’or ».

Un autre bémol à l’utilisation « grand public » du bitcoin est son extrême volatilité, note Le Devoir. Interrogé par le quotidien montréalais, Quentin Kayila, analyste informatique à Québec, juge cependant que ce n’est pas vraiment un handicap : « On a vu de la volatilité dans le marché immobilier, dans l’or, dans les devises. La volatilité n’est donc pas un problème en soi. »

FAIRE SES ACHATS AU QUOTIDIEN EN BITCOINS

Jonathan Hamel croit que la « démocratisation » du bitcoin pourrait également se faire en l’utilisant au quotidien. « L’utilisation du bitcoin comme instrument transactionnel était très difficile à défendre jusqu’à tout récemment en raison des délais avant que la transaction soit confirmée […] Mais on voit des développements technologiques qui vont le permettre », explique-t-il. En effet, ajoute-t-il, grâce au réseau Lightning, qui permettra de réaliser des opérations instantanément et à faibles coûts, la monnaie virtuelle pourrait devenir une option intéressante pour les commerçants qui doivent, aujourd’hui, assumer des frais de transaction élevés.

Le Devoir souligne toutefois que « si l’intérêt des investisseurs pour les cryptomonnaies grandit, leur faible encadrement au Canada limite grandement leur démocratisation ». En effet, l’Autorité des marchés financiers (AMF) ne cesse de rappeler, depuis des années, que les consommateurs doivent se méfier des risques que leur font courir les monnaies virtuelles, et que ceux qui y investissent le font à leurs risques et périls puisque, faute de cadre légal, ils n’ont aucun recours en cas de problème. Afin de « rassurer les institutions qui ont besoin de garanties pour agir », les gouvernements « doivent donc encadrer les cryptomonnaies et la technologie de la chaîne de blocs », insiste Quentin Kayila.

« Ce qu’on va voir, à moyen terme, ce sont des cryptomonnaies soutenues par une devise nationale. Par exemple, la Banque du Canada pourrait émettre des jetons de dollars canadiens. Les cryptomonnaies pourraient [alors] s’appuyer sur quelque chose qui a de la valeur », ajoute Louis Roy, associé en certification et leader en technologie de blockchain chez Raymond Chabot Grant Thornton.

« IL N’Y A AUCUNE RÉTICENCE DES INVESTISSEURS »

« Le réseau Bitcoin et ceux d’autres cryptomonnaies constituent une sorte d’expérience de laboratoire ayant permis de tester une nouvelle technologie, indiquait Hendrix Vachon dans sa note économique. Cette expérience est maintenant entrée dans une nouvelle phase avec le développement de plusieurs applications. La prochaine étape pourrait bien être une utilisation à grande échelle des registres distribués [comme la chaîne de blocs] dans nos transactions courantes. Déjà, des places boursières ont fait un pas dans ce sens, ou songent à le faire. »

Interrogé par Conseiller sur les répercussions possibles de l’affaire QuadrigaCX au sein du public des investisseurs québécois, Martin Lalonde se dit optimiste et continue de croire en l’avenir des monnaies virtuelles. « Je n’ai à ce jour constaté aucune réticence. Au contraire, il y a de plus en plus de monde qui commence à vouloir faire affaire avec des compagnies régulées par les autorités. Et le fait que notre firme ait reçu l’aval de l’AMF pour exercer ses activités incite au contraire les investisseurs qui veulent en savoir davantage sur ce secteur à nous contacter », assure le président-fondateur de Rivemont et gestionnaire de portefeuille.

« Comme notre fonds est inscrit auprès de l’Autorité, les clients sont en confiance, poursuit le dirigeant. Nous faisons affaire avec des gardiens d’actifs qu’elle a acceptés et il y a également des systèmes d’assurances qui ont été mis en place en cas de fraude ou d’autres problèmes. Bien sûr, tout est possible dans ce monde, et la Banque Nationale elle-même pourrait se faire voler… On ne peut jamais dire jamais! Mais tout est fait, que ce soit chez Rivemont, avec le régulateur ou avec nos partenaires, pour qu’il n’y ait aucun problème. Tous nos partenaires au sein du fonds sont des gens ou des entreprises qui ont beaucoup d’expérience en finance, comme KPMG et le groupe TMX à Toronto… Ce sont des gens ou des noms sérieux qui ont établi des systèmes solides pour protéger les actifs des clients. »

Des cryptomonnaies volées par le biais du Google Play Store

Des spécialistes en cybersécurité viennent de découvrir une nouvelle arnaque liée aux cryptomonnaies, rapporte Le Figaro. Cette fois, ils ont constaté que des cyberpirates avaient su exploiter une faille dans une application du Google Play Store afin de détourner des portefeuilles de cryptoactifs et d’en voler le contenu.

Rappelant que tout détenteur de cryptomonnaie se voit attribuer un portefeuille virtuel pour stocker, envoyer, recevoir, acheter ou vendre ses actifs, le quotidien français explique que ce sont les adresses attachées à ces portefeuilles qui ont été piratées.

PRISE DE CONTRÔLE DES PORTEFEUILLES

Lukas Stefanko, un chercheur employé par la firme de cybersécurité ESET, indique en effet avoir décelé une faille au sein d’une application disponible dans le Google Play Store. Téléchargeable sur les navigateurs Chrome et Firefox, celle-ci renfermait en fait un type de logiciel malveillant grâce auquel les pirates informatiques ont réussi à détourner à leur profit des adresses de portefeuille de crypto-actifs. Le Figaro précise que depuis que le pot aux roses a été découvert, l’application malveillante, mise en ligne au début du mois de février, a été retirée.

La manière d’opérer des escrocs était toujours la même, explique le journal : « À chaque fois qu’un utilisateur copiait et collait son adresse, celle-ci était remplacée automatiquement par celle d’un hacker. Lorsque les utilisateurs faisaient des transferts de leur cryptomonnaie, celle-ci était alors renvoyée directement sur le portefeuille du cyberpirate. Ce dernier en profitait également pour voler les identifiants de connexion des victimes afin de prendre par la suite le contrôle de leur portefeuille. Pour le moment, le montant de la fraude n’est pas connu.