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Les propriétaires de PME d’un bout à l’autre du pays sont unanimes : la réforme fiscale envisagée par Ottawa aura un impact « considérable » sur les entreprises.

Parmi les 8 553 propriétaires d’entreprise et les 410 praticiens en fiscalité sondés par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), pas moins de 95 % estiment que l’adoption d’une telle réforme nuirait aux entrepreneurs canadiens.

Le fait de ne plus pouvoir partager leur revenu avec les membres de leur famille est la mesure la plus crainte par les répondants : les deux tiers d’entre eux affirment qu’ils seraient affectés par un tel changement de règles. Le sondage révèle par ailleurs que la moitié des chefs de PME canadiens partagent leurs revenus avec leur conjoint.

L’impossibilité de réaliser des investissements passifs à l’intérieur de la société est également une grande source de préoccupation chez les entrepreneurs, 65 % d’entre eux ayant fait de tels investissements, généralement sous la forme de biens immobiliers.

« On ne parle pas ici d’échappatoires fiscales dont profitent les mieux nantis pour réduire leurs impôts, comme le prétend le gouvernement, soutient Martine Hébert, vice-présidente principale de la FCEI. On parle de mesures fiscales qui permettent aux PME de faire croître leur entreprise, d’assurer une stabilité en période d’incertitude ou d’épargner en vue de leur retraite. »

Sans ces outils de planification fiscale, la FCEI estime que les chefs de PME ne seront probablement pas en mesure de croître ou de créer autant d’emplois qu’ils le font actuellement, et que cela ne sera pas sans conséquence sur l’économie du pays.

GROGNE ET… APPEL AU DIALOGUE

Les voix sont de plus en plus nombreuses à s’élever contre la réforme fiscale du gouvernement Trudeau. Après les provinces la semaine dernière, la Chambre de commerce du Canada est à son tour montée au créneau en fin de semaine. Le cabinet Brassard Goulet Yargeau a également critiqué dans un mémoire les modifications envisagées aux règles concernant les revenus passifs des sociétés privées. Selon le cabinet, il est faux de prétendre que les entrepreneurs ne paient pas leur juste part d’impôt.

Certains intervenants du milieu entrepreneurial se montrent cependant moins réfractaires à la réforme fiscale d’Ottawa. Dans une lettre publiée la semaine dernière dans les médias, sept cosignataires, dont les présidents du Fonds de solidarité FTQ et le célèbre entrepreneur Alexandre Taillefer ont lancé un appel au dialogue au gouvernement fédéral, rapporte La Presse.

Ils estiment notamment que « des arrangements fiscaux peu justifiables et la persistance d’échappatoires ont créé une disparité » et que « qu’au cours des dernières années, la réduction graduelle des impôts corporatifs a fait en sorte que le Canada est maintenant reconnu comme un des pays les plus compétitifs sur le plan fiscal pour les entreprises, tout particulièrement les PME. »

Selon les cosignataires, la réforme du ministre Morneau n’est donc pas « un frein à l’innovation ou un obstacle à l’entrepreneuriat, mais plutôt une occasion à saisir pour assurer une meilleure équité fiscale pour les contribuables canadiens, particulièrement ceux issus de la classe moyenne. »

Cela dit, ils disent comprendre les « craintes légitimes » du milieu des affaires. Ils ajoutent que le gouvernement pourrait devoir apporter des ajustements pour maintenir une fiscalité qui favorise l’entrepreneuriat et la prise de risque tout en visant une plus grande équité entre les contribuables.