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Lorsque le conseiller en services financiers pense au vieillissement de sa clientèle, il se concentre surtout sur les besoins de celle-ci en matière de planification successorale. Toutefois, pour l’investisseur lui-même, les effets du vieillissement (et du déclin cognitif pouvant l’accompagner) sur le rendement de son portefeuille peuvent être significatifs.

Selon la littérature, il existe deux types d’intelligence : l’intelligence cristallisée et l’intelligence fluide.

L’intelligence cristallisée est la capacité d’utiliser les compétences, les connaissances et l’expérience. Ce type d’intelligence s’améliorerait tout au long de la vie et ne chuterait qu’avec l’apparition de l’inaptitude.

L’intelligence fluide est la capacité de penser logiquement et de résoudre de nouveaux problèmes. Elle permet d’analyser des situations inédites, d’identifier des tendances et de faire des liens, ainsi que d’extrapoler. Cette forme d’intelligence est nécessaire pour toute résolution de problèmes.

L’interaction de ces deux types d’intelligence fait que la performance cognitive tend généralement à augmenter dans la première partie de la vie, pour ensuite décliner progressivement, comme le démontre le schéma suivant :

Source : Sumit Agarwal, John C. Driscoll, Xavier Gabaix et David Laibson, The Age of Reason: Financial Decisions over the Life Cycle and Implications for Regulation, 2009.

Selon diverses recherches, il semble que la performance cognitive atteigne son sommet vers l’âge de 53 ans, pour ensuite décliner.

Cette baisse peut avoir un effet sur les rendements du portefeuille d’un investisseur âgé, particulièrement après 70 ans. Une étude réalisée en 2008 montre que les aînés investissant dans des comptes de courtage à escompte réalisent des rendements ajustés selon le risque de 3 à 5 % inférieurs à ceux des autres investisseurs qui utilisaient des comptes de courtage à escompte[1].

DES SOLUTIONS

Comment l’investisseur peut-il se prémunir contre les répercussions du vieillissement? Le conseiller peut-il aider son client à le faire?

En premier lieu, toute personne aurait avantage à rédiger un mandat de protection. Un tel document permet au client de désigner une ou plusieurs personnes de confiance pour s’occuper de lui et de ses finances personnelles en cas d’inaptitude. De plus, un particulier peut déléguer la gestion de son portefeuille à un membre de la famille en rédigeant une procuration.

Au-delà du mandat de protection et de la procuration, le fait d’adopter des comportements spécifiques et d’utiliser certains produits financiers est susceptible de minimiser les effets du déclin cognitif pour l’investisseur.

En retenant les services d’un conseiller, il s’assure d’une gestion professionnelle de son portefeuille et qu’il existe une « muraille de Chine » entre lui et ses placements. Pour certains, cela constitue un inconvénient qui entraîne des frais et empêche l’investisseur de modifier ses propres placements à sa guise.

Mais pour une personne âgée, ces caractéristiques deviennent un avantage – et les frais engagés pour rémunérer le conseiller sont amplement compensés par le fait que les rendements ne seront pas amputés par d’éventuelles mauvaises décisions, comme le démontrent les résultats cités précédemment. En effet, le professionnel des services financiers sera en mesure de mettre en place une politique de placement écrite pour l’investisseur, ce qui viendra ajouter une couche de protection.

Du côté des produits, il pourrait être intéressant d’utiliser des instruments financiers qui « délèguent » l’expertise requise à des professionnels. Par exemple, l’investisseur prudent qui utilise généralement des certificats de placement garanti (CPG) pourrait se diriger vers des produits offrant des garanties de revenu et une gestion professionnelle, comme des rentes et des fonds distincts.

De façon similaire, un investisseur au profil équilibré pourrait avoir avantage à opter pour un portefeuille géré au lieu de tenter de le créer lui-même. Les portefeuilles gérés proposent généralement une gestion de type institutionnel et détiennent une variété de catégories d’actif, pondérées en fonction du profil de risque de l’investisseur. L’avantage de ce type de fonds est qu’il laisse à des professionnels – et non au client lui-même – la tâche de répartir l’argent en fonction des aléas des marchés. Dans tous les cas, l’investisseur âgé aura avantage à automatiser ses placements en vue de se protéger contre les décisions moins qu’optimales qu’il pourrait prendre.

On pourrait résumer ainsi les mesures à prendre :

  • Utiliser les services d’un conseiller en services financiers;
  • Placer une « muraille de Chine » entre soi et ses investissements;
  • Automatiser les placements;
  • Utiliser des produits qui offriront une gestion des placements et une répartition d’actif professionnelles.

QUAND INTERVENIR?

À quel moment l’investisseur devrait-il commencer à se préparer en prévision d’un éventuel déclin cognitif? Quand le conseiller devrait-il entamer une discussion à ce sujet avec ses clients?

Le plus tôt est le mieux, selon nous. La discussion sur la perte de ses capacités est l’une des plus anxiogènes qu’une personne peut avoir dans sa vie. Il est donc primordial d’avoir ce genre de réflexion alors que la possibilité d’un déclin cognitif ou d’une inaptitude est encore lointaine. Cela diminuera d’autant le stress que peut entraîner une telle conversation.

Il n’est pas sage d’attendre que les effets d’un déclin cognitif ou d’une inaptitude commencent à se manifester, car cela rendra difficile – sinon impossible – toute planification en la matière.

Les opinions exprimées dans les billets de blogue n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de Conseiller.ca et de la Sun Life.

[1] George M. Korniotis et Alok Kumar, Do Older Investors Make Better Investment Decisions?, 2009.